samedi 28 juin 2008

Garage sans auto

à ma voisine

Ouvrant la porte de mon garage à Montréal ( j'écris dans un garage) j'entends les chants des oiseaux. Ce matin un oiseau nouveau, dont je ne connais ni le nom ni l'allure, donne de la voix. Est-il d'une espèce plus tropicale? A-t-il les ailes bleues et la gorge verte? Est-ce un égaré? Un transfuge ? Un réfugié politique des espaces saccagés?

Un peu fatigué d'écrire, je me lève. Sortant dans la cour, j'entends un bruit dans les feuillages de mon kiwi actinida. C'est un petit oiseau-chat dans son nid de feuilles, curieux animal qui s'échappe doucement d'un bond en flottant dans l'air. Sa propriétaire lui a passé au cou un collier à clochettes, ce qui le rend inapte à la chasse. Heureusement !

Revenant dans mon garage, et m'asseyant pour écrire, j'imagine Montréal sans automobiles. Pendant de longues heures, le matin, on n'entendrait que les chants d'oiseaux et les pas des passants pressés d'aller au travail, regrettant dans le métro leur passage trop rapide sous les arbres où chats et oiseaux chassent le temps perdu.


Car en marchant nous créons une émotion qui donne vie au paysage, nous lui donnons une partie de nous-mêmes qui l'imprègne pour toujours.
Or, effectivement en écoutant les oiseaux, en aspirant les odeurs des bleuets en fleurs et des foins que l'on fauchait un peu plus au sud, je sentais monter en moi cette force morale qui avait donné à nos ancêtres la possibilité de survivre dans cette région ignorée du reste du monde.

Roger Fournier, Gaïagyne

Bain de sons

Le matin, je m'assois sur la galerie. De la montagne, qui est de l'autre côté du lac, et tout autour de moi, les oiseaux dans l'air humide d'une pluie nocturne m'offrent un bain de chants. Je m'enrobe de cette eau soyeuse. Toutes les pores de ma peau absorbent les sons de l'aurore.

Brume

Je ne voyais rien devant moi que ce blanc de nuage. Le soleil la perçait en un seul point, y déposant une étoile. Regardant de la fenêtre, j'imaginais un paysage silencieux. Je me disais que pour les oiseaux cette brume était un espace infranchissable et mortel, où l'on ne peut ni voler ni trouver de la nourriture. J'ai ouvert la porte. Le foisonnant des cris et des chants dans l'air. Plus de mort. La mort est le silence. Que le délice de ce qui m'est invisible et le scintillement des chants.