Moucherolle de la volonté enlacée à l'air, qui creusait l'espace pour attraper la mouche, la libellule, le maringouin. Qui allait de cette branche d'arbre vivante à cette autre branche sèche puis à son nid pour apporter les mouches aux petits becs s'ouvrant sans fin. Qui passait sans cesse devant mes yeux, me rappelant cette volonté toujours présente en nos pensées et nos gestes, souvent superflue, parce que liée à ce qui n'est pas nécessaire ou à ce qui ne semble pas l'être, comme l'art. Cette volonté dont il faudrait si souvent départir pour se laisser porter uniquement par le vent, devenir mouvement.
Deux moucherolles alignées sur une branche, le mâle et la femelle, la femelle lisse sur la branche son bec pendant que le mâle me surveille. Je ne dois pas bouger, sa volonté contre la mienne. Je n'arrive pas à détacher mon oeil de ses mouvements de tête suivis de ses mouvements de queue. Lui, il veut aller porter la mouche à ses petits, emprunter à l'air son mouvement pour devenir air lui-même, se déplacer le plus furtivement possible, pour nourrir l'air, en retour, de cette qualité de volonté efficace qui émeut. Je tourne la tête, il passe sans que je le voie. J'entends un léger déplacement d'air.
Les jours s'allongent, les nuits raccourcissent. Les moucherolles vont et viennent. Plongeant pour attraper l'insecte d'un coup de queue simple, elles reviennent sur la branche qui se balance, en lançant un simple pépiement qui affirme : il faut être dans l'air le mouvement qui sans cesse apporte et enlève, tue et fait vivre.
Hier, elles étaient parties. Le nid était vide. Je l'ai tout de suite senti en arrivant au lac. Ils n'étaient plus là ces guetteurs admirables de nos moindres mouvements. Nous étions inquiets un instant d'une mort possible des petits, mais le nid, au coin du toit de la véranda, était intact. Ils étaient partis tout simplement.
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