Celui qui voit la loutre, je le connais depuis longtemps. Il s'est arrêté, il a entendu un bruit d'eau. Il a vu dans le ruisseau un museau sortir et entrer très rapidement. Je me suis immobilisé moi aussi. J'ai entendu tous ces oiseaux qui l'accompagnent quand il va en forêt. Mais il ne le sait pas qu'il les attire, qu'il les connaît, qu'il les convoque. Que l'espace de silence qu'il crée, les assemble autour de lui. Il a beaucoup lu sur eux, dans son enfance, puis les a abandonnés à eux-mêmes. Il me dit : j'ai vu une loutre. Je pense qu'il ne peut y avoir de loutre ici, à Val-David, dans ce parc très fréquenté. Que c'est peut-être une martre. Il est affirmatif, ce ne peut-être qu'une loutre. Et je suis certain qu'il a raison. Lui, il ne sait pas qu'elle a levé le nez pour le voir surgir dans le paysage. Il ne sait pas que je n'ai jamais vu de loutre. Je regarde le ruisseau, il est calme et fluide et ne révèle aucun autre mouvement que celui de son écoulement. Nous nous arrêtons un peu plus loin. Encore une fois, cela chante, cela s'élève. Il ne le sait pas qu'il appartient à la forêt et au calme de ce paysage.
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